Le bleu du ciel 12, rue des fantasques 69001 Lyon France
À travers la série photographique Mémoire (2006), Sammy Baloji propose une réflexion sur l’histoire en mettant en perspective les vestiges de la colonisation et la situation actuelle de sa ville, de sa région et de son pays.
Le présent et le passé se rejoignent autour de l’élément fondateur du Katanga moderne : l’exploitation minière par l’Union Minière du Haut Katanga. Fondée par le colonisateur belge, devenue Gécamines après l’indépendance, l’entreprise est aujourd’hui à bout de souffle, comme le montrent ces usines étrangement vides de tout travailleur. L’UMHK a entrepris, à travers un fonds photographique considérable, de mettre en scène le projet colonial de modernisation et sa mission « civilisatrice », parfois au prix d’images violentes, comme la série de portraits collectifs au caractère anthropométrique.
Pour cette série, Sammy Baloji, après avoir photographié des paysages industriels, est entré en contact avec des photographies des archives de l'UMHK et de la Gécamines. Il en a extrait des humains pour que leur image témoigne de ce qui est absent. Le travail de mémoire se saisit du travail de dont l'absence hante les ruines. Le collage numérique lui permet d'appliquer les personnes d'hier sur des paysages
industriels d'aujourd'hui. Puisqu'il ne masque pas la limite des humains et des ruines, le spectateur confronté à deux époques, la modernité et la désindustrialisation, est interpellé.
Mémoire est certainement dans l'oeuvre du photographe Sammy Baloji la série la plus spectaculaire, celle qui a permis à ce jeune artiste de gagner très rapidement la reconnaissance du milieu international de l'art contemporain.
Incrustation dans les paysages actuels de friches industrielles du Katanga de photographies d'archives de l'UMHK la société minière coloniale, les images grand format de Sammy Baloji mettent en scène dans une silencieuse violence la confrontation de deux mondes, mais d'une seule et même histoire. Comment en regardant ces images ne pas faire le parallèle avec les implantations industrielles imposées il y a 90 ans au paysage de savanes, telle une blessure?
Des images saisissantes à la composition étudiée où noir et blanc renvoient aux temporalité différentes; la désolation d'aujourd'hui, la désaffection de ces sites jadis pourvoyeurs de richesse et de travail et la mise à nu, dans son implacable véracité, de l'exploitation par le colonisateur, des travailleurs noirs, tour à tour décharnés, humiliés ou dressés dans l'expression d'une puissance physique porteuse d'avenir.