Musée de la photographie André Villers Porte Sarrazine F-06250 MOUGINS VILLAGE France
This is war ! Exposition au Musée de la Photographie André Villers-Mougins
Guerre et photographie ont connu deux destins croisés. La multiplication des conflits au XXème siècle et l'importance qu'ils ont pris jusqu'à devenir mondiaux en 1914 et 1939, ont favorisé les progrès techniques dont a profité la photographie. Si nous trouvons dans les archives des images de la Guerre de Sécession aux Etats-Unis ou les clichés de Roger Fenton retraçant la Guerre de Crimée, c'est dans les années trente que le reportage de guerre se développe réellement. La miniaturisation des boîtiers et l'émergence de la pellicule à haute sensibilité ont rendu possible l'instantanéité de la prise de clichés qui, on s'en doute aisément, est le passage obligé de la photographie de guerre.
Parmi les conflits de l'histoire contemporaine, la Guerre de Corée fait partie des moins connus. Elle n'en fut pas moins la plus meurtrière de la deuxième moitié du XXème siècle. Elle débuta dans la matinée du 25 juin 1950, au moment où les troupes nord coréennes ont lancé une attaque dans la péninsule d'Ongjin, à l'extrémité du 38ème parallèle, la ligne de démarcation séparant les deux parties du pays. Elle s'acheva le 27 juillet 1953 par un armistice signé et illustre parfaitement la stratégie des deux superpuissances, les Etats-Unis et l'URSS pendant la « guerre froide »: maintenant la tension localement en éviatnt qu'elle ne débouche sur un conflit généralisé.
La guerre de Corée s'inscrit chronologiquement entre la Seconde Guerre Mondiale et la très médiatique Guerre du Vietnam. On évalue en effet le nombre de victimes à 38.500 dans les forces onusiennes, à 70.000 dans les forces sud-coréennes et... à 2millions chez les combattants nord-coréens et chinois? A ceux-là s'ajoutent les civils, victimes des bombardements, des disettes et des épidémies (peut-être 3 millions).
Envoyé par le magazine Life, le photographe David Douglas Duncan fut témoin des rudes combats qui ont caractérisé la lutte d'influence entre ces deux idéologies antagonistes. En 1951, il publie l'ouvrage This is War!, titre de l'exposition qui aura lieu au Musée de la Photographie André Villiers.
Duncan n'était pas sur le front par hasard. Officier dans le corps des Marines durant la Seconde Guerre mondiale, il retrouvait ses frères d'armes. Sa série de photographie nous fait vivre la guerre de l'intérieur: des combats dans la montagne jusqu'à l'attaque de la ville d'Incheon.
La photographie de David Douglas Duncan est un hymne au courage. Le sien, tout d'abord. En effet, la nature même de sa mission, imposait une attention toute particulière à l'autre, avant m^me de s'occuper de l'ennemi et sa à sa propre existence qui plus est.
Le photographe se doit d'être en constant décalage dans l'espace et se préoccuper de l'angle de vue qui constituera une bonne ou une mauvaise photographie. Il se doit également d'arrêter le temps pour parvenir à ce fameux « instant décisif » (Cartier Bresson), pendant que les balles fusent, que les obus éclatent, que les troupes avancent, que les soldats tombent autour de lui?
Hymne au courage des soldats également, devant sans cesse se surpasser, oublier leurs peurs et leurs souffrances afin d'atteindre la seule chose qui compte pour eux: avancer. Si les combats ont été rudes en Corée, les conditions climatiques extrêmes, le froid dantesque notamment, ont été, aux dires de David, peut-être plus insupportables que la guerre elle-même.
La guerre moderne c'est également la confrontation directe des populations civiles avec les combats, ce qui produit des images quasiment surréalistes et dramatiquement photogéniques, tant le chaos qui y règne s'empare de l'atmosphère.
Des combats d'autrefois, il reste une frontière et les récits de David Douglas Duncan. Ses reportages font partie des plus complets sur un sujet qui à jamais hantera ses souvenirs.
La guerre est liée à la photographie, elle fait corps avec cet homme qui s'est rendu par la suite au Vietnam. Il garde de ces conflits un souvenir poignant et amer que seul l'attachement à son pays peut en partie amoindrir. Si David est citoyen américain, il a choisi la France et plus particulièrement la Côte d'Azur comme terre d'accueil.
Après avoir tant enduré durant toutes ces campagnes militaires, photographier Picasso spontanément, nu dans sa baignoire, alors qu'ils se connaissaient à peine, fut pour lui un jeu d'enfant. Un jeu qui a paru drôle au génie espagnol, puisque leur amitié a perduré jusqu'à la disparition de ce dernier, un exercice beaucoup plus joyeux que cette guerre dont on commémore cette année le soixantième anniversaire.