"Il est là, silencieux, tapi dans l’ombre de la salle, l’oeil alerte et le geste sûr. Invisible. L’artiste, sur scène, ne le voit pas, mais tourne inéluctablement son regard vers l’objectif. Parfois même… son âme. L’émotion est palpable, le muscle fort, la concentration maximale, la beauté transcendée : suspendus dans le temps, des danseurs nous observent, un ténor se tait, une choriste se laisse envahir par la grâce. Le temps d’un clic, précis, imparable. Cadrage court, optique fixe ou télé objectif, fidèle à Nikon, l’homme est armé et en vrai chasseur, ne cherche pas la facilité : jamais vous ne le verrez sur un filage ou sur une répétition. Les sensations doivent être brutes, vraies, immédiates. Alain Hanel aime le danger, s’en délecte presque. Pas de mitraille, pas de préparation, juste l’aléatoire jeu des lumières et des hommes. Le doigt sur le déclencheur, Hanel attend son heure,
tel un tireur embusqué. Qui d’Alain Hanel ou du spectacle vivant, a choisi l’autre ? La relation est si intime, si évidente entre l’homme est les planches, qu’on ne pouvait imaginer plus belle résurrection, après trente
longues années d’abstinence consacrées à d’autres images : côté médias, il aura survécu à tous les grands écarts, passant des bureaux de la rédaction d’Hara Kiri rue Montholon aux plateaux de la maison de l’ORTF avec Jacques Martin (sacro-sainte période du Petit Rapporteur et de la pêche aux moules), s’acoquinant à la radio ou à internet encore balbutiant. Il mettra ses graphiques compétences au service de la musique (déjà !) en signant quelques mythiques pochettes de disques pour Claude François ou Mike Brant. Une autre façon de fixer les images. Et les icônes… Retour en 2008. D’autres paillettes, d’autres artistes, d’autres lieux, plus feutrés. D’autres expériences, d’autres passions. Mais encore et toujours l’oeil du maître."
Isabelle Auzias – Rédactrice en chef « La Tribune Côte d’Azur »