Galerie du Centre atlantique de la Photographie – le Quartz Square Beethoven, 60, rue du Château 29 211 Brest France
Le CAP propose une exposition sur les Etats-Unis contemporains : le regard de Richard Pak sur l’Amérique d’aujourd’hui. Une plongée photographique pleine de références photo et cinéma. Après William Eggleston, Robert Frank ou Richard Avedon, l’habile Pak reprend les parcours de regards de ces prestigieux aînés.
Travail réalisé de 2003 à 2009, Pursuit est une chronique désenchantée d’un quotidien américain. Imprégné d’un imaginaire aux sources multiples, fruit de la confrontation d’une Amérique mythifiée et de l’expérience vécue, c’est une fiction photographique à l’échelle du pays.
Pursuit, le titre de cette série, fait écho à la Déclaration d’Indépendance des États-Unis qui mentionne le droit de chacun à « la vie, la liberté, et la poursuite du bonheur». Ce travail est une chronique photographique de la quête de cette chimère, le bonheur, érigé là-bas en droit constitutionnel. Le champ d’application auquel je choisis de m’intéresser est double puisque ce sont deux facettes de la société américaine que je veux mettre en parallèle. D’un côté une Amérique dite favorisée, celle de la middle class intégrée qui vit le «rêve américain » et de l’autre ceux, nombreux, qui aspirent à ce même idéal, qui le poursuivent sans jamais l’atteindre. Ce travail n’a pas pour finalité de donner à voir un état des lieux de la société américaine actuelle, objectif et distancié. La réalité qui s’offre à moi et dont je me sers devient la matière première qui permettra de créer, ou à défaut évoquer, une oeuvre de fiction, celle d’une Amérique remplit par le vide, l’absence et le silence.
A l’origine de ce travail il y avait, il y a toujours, la fascination pour les États-Unis. Une fascination qui passe d’abord par l’image. Des images photographiques en premier lieu, inévitablement. La photographie américaine est excessivement riche, beaucoup y voient même le berceau de la photographie moderne, et elle a eu une importance certaine sur mon rapport à ce médium. Des images cinématographiques aussi. Celles des films du Nouvel Hollywood qui peignent si bien l’énergie, la jeunesse et la contre-culture propres aux années 60s/70s en Amérique. Des images, encore, avec l’univers réaliste des tableaux d’Edward Hopper ou encore l’iconographie populaire revisitée par Jasper Johns. A cette fascination pour une Amérique visuelle il faut ajouter la littérature, qui aura été une source au moins aussi importante à la construction de cet imaginaire américain. John Fante, Truman Capote, Raymond Carver et tant d’autres ont eux aussi gravé en moi des images, mentales cette fois.
J’ai choisi de photographier le banal, le quotidien d’une Amérique contemporaine. Je prélève des échantillons d’humanité, et s’il arrive que j’utilise l’anecdotique, ou le spectaculaire, c’est pour les dépasser en cherchant des résonances avec des concepts plus profonds, plus universels. En jouant sur les variations des thèmes de l’ennui, de l’isolement voire de l’abandon (d’un proche, d’un idéal ?) j’essaie de faire entendre ce que résume Pierre-Yves Pétillon (in Histoire de la Littérature Américaine, éd. Fayard.), cette voix si américaine, faite de solitude et de stoïcisme, où l’on perçoit, comme dans un tableau d’Edward Hopper, ce mélange de mélancolie léthargique et de nostalgie des lointains.
Richard Pak