Expositions du 05/07/2005 au 18/09/2005 Terminé
Les Rencontres d'Arles 10, rond-point des Arènes 13632 Arles France
Un programme destiné à la réalisation de portraits-robots (le même qu'utilisent la police, la gendarmerie française ainsi qu'Interpol entre autres organismes), tel est l'outil à partir duquel Leandro Berra propose à chacun d'entre nous de réaliser son “propre” autoportrait.
Assisté par l'artiste et à partir d'une base de données constituée de milliers d'éléments, le participant cherche à trouver ceux qui lui ressemblent : les yeux, le nez, la bouche, etc., pour composer un visage dans lequel il arrive à se reconnaître.
Le protocole qui encadre cette action demande au participant de travailler exclusivement d'après son souvenir, sans recours à un miroir, une photo ni à l'aide d'un tiers. Leandro Berra crée ainsi un espace où est donnée l'occasion de se « souvenir » de soi-même et de se raconter dans un univers extérieur à celui du langage. Autrement dit, Berra met en scène cet acte complexe et éminemment intime qui est de faire son autoportrait.
Cet exercice peut nous confronter, dans un premier temps, aux imprécisions de la mémoire de soi et aux limites de la conscience qu'on a de sa propre image. Mais aussi, par là même, aux imprécisions et limites de toute représentation.
La proposition se poursuit en confrontant cet “autoportrait” avec la photo de la personne représentée, prise par Leandro Berra une fois l'autoportrait-robot terminé. Cette photo, qui adopte la (non) esthétique de la photo d'identité, vient annoncer la fin de la recherche de ressemblance, en se constituant comme une nouvelle tentative de cette même recherche.
On constate que, dans le cadre de cette procédure, le fait que la photo soit prise dans la logique de la « photo d'identité », la fragilise en nous rappelant la démesure du pouvoir qu'on lui accorde en acceptant qu'elle soit utilisée pour attester (au moins légalement) de qui nous sommes.
La technique du portrait-robot n'a pas pour but de faire apparaître la photo ou l'impossible représentation d'une personne recherchée. Elle tente de restituer une image qui permette de reconnaître un individu parmi d'autres à partir des limites du souvenir.
Un des principes ayant guidé la conception est basé sur l'imprécision de l'image que le programme fournit. Il n'a pas pour mission d'établir une présence, sinon celle d'évoquer, de matérialiser la mémoire d'une absence.
On pourrait dire que le portrait-robot essaie avant tout de dresser un portrait à partir de ce à quoi nous ne ressemblons pas, à partir de ce qui nous différencie des autres. Il essaie de construire quelque chose comme l'image générique d'une différence.
C'est ainsi un jeu par lequel le souvenir de sa propre image finit par chercher à se reconnaître en celle d'une absence.
Ce projet, plutôt qu'un essai de renouveler le rôle du portrait, prétend questionner sa faisabilité, en se servant d'un outil validé socialement pour l'identification des personnes. Cet outil produira (comme l'appareil photo, d'ailleurs) une image qui signale la possibilité et la difficulté de nous reconnaître dans notre étrangeté.Les Rencontres d'Arles 10, rond-point des Arènes 13632 Arles France