La plupart des étrangers à la recherche de tranquillité ne choisissent pas Caracas. Mais les photographes de presse ont une idée du calme souvent déformée. Lorsque Christopher Anderson a décidé, il y a quelques années, d'arrêter de photographier les zones de confl it du Moyen Orient, il s'est rendu directement au Venezuela. C'était en mars 2004, le pays allait voter par référendum le maintien au pouvoir du président Hugo Chavez et la criminalité fortement en hausse valait à Caracas, le titre de "capitale mondiale du meurtre". "Je me suis dit, allons voir ce qui s'y passe. Puis, j'ai été comme aspiré par le lieu," se souvient Anderson. Ses saisissantes photos noir et blanc abordent plusieurs aspects de la vie du capitolio ; échanges de tirs comme dans un fi lm violent entre policiers ivres à moto et gangs de rue, bidonvilles brûlant de sexe et de violence, et bien sur, supporters et détracteurs de Chavez. Même pour un photographe de confl it chevronné, Caracas est un endroit diffi cile à photographier, dit-il. Tout d'abord, le gouvernement l'a bien accueilli, puis la vie est devenue plus compliquée. Il a été arrêté plusieurs fois, les gens le suspectaient constamment. "Au Venezuela, l'appareil photo est une arme, d'un côté comme de l'autre, que vous soyez pour ou contre Chavez," se souvient-il. Il s'est mis à utiliser un Contax T3, un petit appareil photo compact qui, précise-t-il, allait parfaitement dans son sac banane, ainsi personne ne pouvait soupçonner qu'il était un grand photographe de l'agence Magnum. (Note : le Picture Show autorise l'utilisation du sac banane en cas de situations extrêmes.) De façon générale, il n'a pas accepté de contrat durant cette période,"parce qu'il ne voulait pas être contrôlé". Il voulait que l'expérience se déroule sans plan prédéterminé. Entre les rassemblements et les champs pétrolifères, il semble avoir trouvé quelques moments de tranquillité : un refl et évanescent à une fenêtre, un chien sortant de l'ombre, la brume fl ottant au-dessus de minuscules maisons. Dans le livre, ces moments de paix sont souvent juxtaposés à des images plus discordantes, un rappel des contradictions inhérentes à Chavez Land.