Maillon-Wacken Place du Wacken 67000 Strasbourg France
En France, en Europe et ailleurs, les formes pavillonnaires construites sans architecte se généralisent, au détriment d’une véritable architecture contemporaine dans la production domestique de la maison individuelle. L’exposition d’Isabelle Hayeur dénonce ce système de standardisation des modèles pavillonnaires, amalgames d’identités culturelles et d’imaginaires calqués créant une confusion entre ce qui appartient à notre héritage culturel et ce qui n’est qu’une valeur marchande de substitution.
« La terre où je suis né m’est devenue étrangère à mesure que je la découvrais. Le désir de photographier cette scène est moins lié à la volonté d’en poser le décor que de m’y situer moi-même. » Guy Tillim
Dans son travail, Isabelle Hayeur aborde la question de l’intervention de l’homme sur le territoire naturel et des conséquences de celle-ci dans l’aménagement des banlieues nord-américaines.
Son approche de la photographie est liée à l’inquiétude que suscitent ces espaces occupés et façonnés par l’homme.
Ces nouveaux territoires sont fabriqués de toute pièce, la construction de ces quartiers en banlieue se faisant au détriment des milieux naturels. Il s’en suit une perte dramatique et irréversible de la biodiversité ainsi que des modifications notables du territoire.
Ayant vécu elle-même dans une banlieue pendant une vingtaine d’années, Isabelle Hayeur a été confrontée au spectacle de l’urbanisation étalée et aux nombreuses disparitions qui l’accompagnent. Témoin de la modification des paysages, elle l’a vécue comme un « déracinement en continu ». L’espace devient anonyme et uniformisé, il est privé de son histoire.
Isabelle Hayeur traîte de façon très personnelle la question de l’aménagement du territoire dans les banlieues nord-américaines au travers des deux séries photographiques qui composent cette exposition, à savoir : « Maisons modèles » et « Excavations ».
L’artiste ne cherche pas à dépeindre le monde tel qu’il est, elle souhaite davantage nous rendre sensible aux changements qui s’opèrent sous nos yeux.
Les univers qu’elle construit nous amènent à réfléchir sur nos façons d’aménager et imaginer nos territoires. Le paysage est un projet entre l’homme et le monde : en le réinventant nous définissons de nouvelles relations individu-milieu et construisons nos identités.
Maisons modèles
Les photographies d’Isabelle Hayeur sont le fruit de subtiles manipulations infographiques. Elle amalgame en une image parfaitement unifiée une diversité de lieux et de temps.
Il résulte de ces associations de fragments hétérogènes une impression de vraisemblance, une forme de réalisme, qu’un examen plus attentif de l’oeuvre remet cependant en cause.
De fait, des ruptures d’échelles, des insertions iconographiques diverses et des effets de surimpressions à peine décelables trahissent le caractère construit d’une oeuvre élaborée à partir de prises de vue réalisées par l’artiste, mais aussi d’images trouvées sur le Web.
Un des ressorts cruciaux de sa démarche tient aussi dans un équilibre entre artifice et vraisemblance, entre document et fiction.
Excavations
Dans cette série, Isabelle Hayeur s’intéresse aux relations de réciprocité qui existent entre l’homme et le monde. Elle interroge la façon dont l’homme s’inscrit dans le monde par ses actions. Notre époque est probablement celle où cette relation est la moins harmonieuse. Dans cette série, l’objet de sa réflexion est le chantier. Celui-ci n’est qu’une étape intermédiaire dans l’établissement d’un paysage avant que l’homme ne s’y installe. Ce qu’elle donne à voir dans ses photographies, c’est davantage le processus de transformation lui-même que la représentation d’un lieu existant.