Klaus Thymann, www.lumas.fr
Le mythe de la métropole est un thème cher à beaucoup d’artistes et a toujours été une source riche d’inspirations pour leurs oeuvres. Aucun autre lieu ne connait autant de mutations, ne regorge d’autant de vie et de tumultes. Le mouvement est partout, sans relâche. Jamais la grande ville ne rencontre de repos durable. Où que l’on soit, où que l’on stationne, nous sommes toujours devancés ou suivis d’un autre. Nous ne sommes jamais seuls. On ne peut pas réduire la métropole à une petite chose.
Les artistes de l’exposition se représentent ainsi les défis de cette nouvelle urbanité insatiable et nous montrent avec leur travail à quelle point l´emprise et l’impression de la grande ville peuvent être individuelles.
Les photographies d’Henning Bock se caractérisent par leur clarté et leur ampleur. Il en est de même des fascinantes impressions qu’il nous livre du temple d’Angkor Wat au Cambodge ou de celles de l’oeuvre architecturale d’Oscar Niemeyer à Brasilia. L’artiste parvient toujours à créer des espaces uniques, emplis de beauté et d’un silence méditatif. Les représentations des villes modernes de Stephen Haley, qu’il nomme “photographies virtuelles” sont scientifiquement fondées comme des commentaires visuels d’événements présents et à venir. Aidé d’une technique 3D, il crée des illusions trompeuses avec moult jeux de miroirs dont résultent des espaces à la frontière entre le réel et le virtuel. Pour lui, tout véritable espace est constitué d’après des modèles. Il nous offre ainsi des oeuvres impressionnantes et déconcertantes qui nous plongent dans une véritable réflexion sur notre futur. H.G Esch, photographe d’architecture, est lui aussi fasciné par l’aménagement urbain et par ses dimensions grandiloquentes. De New York à Hong Kong, du Chrysler Building aux quartiers résidentiels des capitales chinoises, ses photographies expriment avec force les concentrations humaines et les perpétuelles évolutions des mégalopoles modernes.
Autre photographe, autre genre, mais toujours la même fascination pour la Grande Ville. On retrouve dans les photographies de Klaus Thymann une empreinte sombre que l’on pourrait attribuer à son passé de concepteur de clips pour des chanteurs comme Depeche Mode ou David Bowie. Son sujet est Shanghai, mais un Shanghai enfumé, loin des lumières du boom économique. Le protagoniste étranger est confronté à l’authenticité de la mégalopole avec ses côtés les plus obscurs, mais dont émane étonnamment une force érotique indéniable.
Différent, l’artiste espagnol Pep Ventosa, dans son projet intitulé The Collective Snapshot (L’instantané collectif), condense, dans de surprenantes compositions, des centaines d’images, cartes postales et photographies personnelles représentant les emblèmes de nos métropoles. À travers leurs multiples projections, ces icônes de l’architecture rappellent le futurisme et le photodynamisme et deviennent les témoins uniques de notre mémoire collective. L’artiste berlinoise Sabine Wild voit la ville comme un entrelacs de lignes. Elle travaille avec l’outil numérique comme le peintre le ferait avec la peinture et le pinceau. Les photographies de grand format de la série New York Projections rappellent dans leurs traits l’Expressionnisme Abstrait. Elle décompose des structures urbaines pour les recomposer sous formes de lignes ou de surfaces verticales et horizontales. Samuel Zuder, citoyen du monde, cherche à retranscrire grâce à sa photographie, la puissance émotionnelle des lieux les plus banals dont l’identité s’est dissoute depuis longtemps dans le « déjà vu 1000 fois ». Son but n’est pas de chercher à révéler l’originalité des lieux mais au contraire de donner à chacun de ses protagonistes, une individualité et signification propres. La ville et la concentration humaine appartiennent à ses thèmes de prédilection en tant que lieu de foisonnement des affections et des émois de l’humanité. Mais à travers ces oeuvres, ce chaos dégage étonnamment une étrange tranquillité. Là réside sa force.