Carlo Ponti

Carlo Ponti

#Photographe #Incontournable
Carlo Ponti (1823-1893) opticien d'origine suisse et photographe à Venise. Carlo Ponti est né a Tessin en Suisse.
Il est avant tout opticien, et l'on sait que son commerce d'optique, au 52, Piazza San Marco, demeure le plus important de la province de Venise. Il ne se contente pas de faire de la vente, mais produit aussi du matériel photographique: le 30 mai 1854, rappelons-le, il recevait une médaille d'argent à l'Esposizione Industriale Veneta pour la qualité de ses objectifs.

Ainsi, dès 1860, Carlo Ponti met au point l'Aletoscopio (du grec ”vrai”, ”exact” et ”vision”), visionneuse pour images photographiques de grand format. Il en fait parvenir un exemplaire à la Société Française de Photographie en 1861 et, le 14 avril de la même année, il présente son appareil à l'Institut des Sciences, des Lettres et des Arts de Venise qui lui octroie en mai 1861 une mention honorable. Carlo Ponti prend soin de s'assurer la ”privatisation industrielle” de son invention, et ce dès le 11 janvier 1862.

En 1862, l'opticien Carlo Ponti met au point le Megaletoscopio, version agrandie de l'Aletoscopio, pour lequel il obtient le Grand Prix à l'Exposition Internationale de Londres; il dépose un brevet provisoire le 10 juillet de cette année et en confie la fabrication à un artisan ébéniste, Demetrio Puppolin, dont le nom figure parfois sur l'appareil, tout comme celui de Carlo Ponti.

Le Mégalétoscope, l'Alétoscope et leurs variantes, construits entièrement en bois, existeront en diverses versions: noyer simplement orné de moulures, marqueterie, ou encore agrémenté de sculptures.

Il existait une version particulière du Mégaléthoscope, portant parfois le nom Megaletoscopio privilegiato, prévue pour recevoir des planches légèrement incurvées, à effet jour et nuit ou également, semble-t-il, comprenant uniquement l'épreuve à l'albumine montée sur un châssis en forme. S'agit-il d'une version plus luxueuse visant, par ce subterfuge, à corriger les problèmes de netteté du système optique? Autre hypothèse: ayant réussi par la suite à corriger ce système et les aberrations qui en découlaient, Carlo Ponti peut alors concevoir un appareil pour planches planes. Les deux versions ont d'ailleurs certainement coexisté, tant le modèle d'exécution simple que ses variantes plus sophistiquées.

L'Alétoscope et le Mégalétoscope s'utilisent pour visionner de deux manières différentes des photographies à effet jour-nuit. A travers le système optique auquel on accède par le dessus de l'appareil, l'observateur regarde des images fortement agrandies et peut procéder à une mise au point en coulissant cet élément dans une rainure prévue à cet effet.

La vision ”jour”: Le volet supérieur du corps de l'appareil s'ouvre pour permettre à la lumière ambiante d'éclairer de face la photographie, un tirage sur papier albuminé très fin monté avec d'autres éléments sur un cadre de bois muni de poignées latérales pour la manipulation. Le corps de l'appareil peut opérer une rotation de 90° pour la vision des images verticales, et un deuxième volet est prévu pour cette position; ces volets sont munis d'un miroir pour améliorer l'éclairage du sujet.

La vision ”nuit”: En refermant les volets latéraux, en ouvrant un troisième volet situé derrière l'image et en y plaçant une source lumineuse, un décor nocturne coloré, ou une ambiance totalement différente, apparaissent dans la photographie: celle-ci est en effet doublée de feuilles de papier très fines avec aplats de couleurs et autres motifs, et de gazes faisant diffuseur, le tirage étant parfois percé de trous d'épingle peu visibles en vision ”jour” et perçus comme des points de lumière vive en version ”nuit”.

Le Musée suisse de l'appareil photographique a eu la chance d'acquérir en 1993 un Mégalétoscope accompagné de 20 planches d'environ 30x40 cm de format, qui ont fait l'objet d'une restauration exemplaire.

Ce Mégalétoscope, version en noyer vernis ouvragé avec simplicité, porte une plaque ovale en céramique où figure, en lettres or, noires et rouges, l'inscription suivante:

Aletoscopio
di
Venezia
C. Naya

Le mot ”Venezia” est inscrit sur un ruban vert pâle, tandis que l'ovale de la plaque est souligné d'un filet or quelque peu passé.

La présence de cette plaque est intéressante à plus d'un titre: il s'agit bien d'un Mégalétoscope et non de l'Alétoscope dont les dimensions tant de l'appareil que des images sont nettement inférieures. Aletoscopio devait donc être un terme générique que Carlo Naya a utilisé pour sa propre production.

Pourquoi le nom de Carlo Naya, dont on sait les relations avec Ponti, sur une production réputée être de Carlo Ponti? Si celui-ci a effectivement acquis l'exclusivité de cette production en 1862, la confusion administrative régnant au lendemain de l'adhésion de la Vénétie à l'Italie en octobre 1866 a fait tomber ce privilège et d'autres photographes vénitiens, dont Naya, ont pu faire fabriquer et vendre cet appareil.

Naya a même travaillé avec l'ébéniste de Carlo Ponti, Demetrio Puppolin. Cette ”traîtrise” de Naya lui vaudra en 1868 une longue procédure judiciaire, Carlo Ponti tentant de le faire condamner et de récupérer par la même occasion son monopole.

Le Mégalétoscope du Musée suisse de l'appareil photographique est donc une production de Carlo Naya, copie conforme de celle de Ponti, production qui se confirme par la présence dans les images qui l'accompagnent de photographies dues à Naya: on en retrouve dans un album à son nom.

Autre indice que livre cette plaque: ce Mégalétoscope n'a pu être commercialisé sous le nom de Naya que dès 1866, même s'il a pu être fabriqué auparavant...