Vendredi 03 Août 2012 15:13:22 par actuphoto dans Concours
Le Prix Niépce 2006 a été attribué à Yuki ONODERA.
Crée en 1955, Le Prix Niépce récompense chaque année l'œuvre d'un ou une photographe professionnel âgé de moins de 45 ans.
Le Prix Niépce est doté d'un montant de 8000€ par la société CANON communication et image France.
Le jeudi 26 mai, la Bibliothèque nationale de France a accueilli le jury pour les délibérations et la proclamation du lauréat, rue de Richelieu, en présence de son Président, Jean-Noël Jeanneney.
Les Galeries photos de la FNAC.com sont partenaires des Gens d'images.
Elles exposent les travaux du lauréat du Prix Niépce dans plusieurs Galeries FNAC en France et à l'étranger.Pour en savoir plus : http://www.gensdimages.com
Pénétrer un appartement avec une lampe de poche, en photographier les détails dans un miroir ; exposer de la fripe à la verticale sous un ciel moutonné.
Yuki Onodera s'aventure aussi aux abords de maisons japonaises (achetées neuves, elles seront détruites après une génération, comme on se déleste d'un kodak jetable). De leurs vérandas allumées, vrais vers luisants, « on peut lancer un appel et se voir soi-même répondre à la fenêtre ». L'œuvre se traduit sans cesse par cet évidement de formes, humaines ou objectales (qui d'ailleurs s'équivalent). Certes, tout y est contexte, identité mais pas seulement. Car un doute fécond incline l'artiste à éluder « toute odeur humaine », à écarter surtout « la photographie » en la poussant à bout, à ses limites.
How to Make a Pearl (2000-2001) tente de séparer l'objectif de son « inévitable sujet ». Pour cela, Onodera a mis au point un procédé profane. Une bille glissée entre la loupe et l'œil produit dans le boîtier un « événement » puis convoque son alter ego : la foule. « Passionnée », prête à se défaire, à essaimer, celle-ci, contre toute attente, se mue en statuaire.
Et la bille ? Au zoo – « scène théâtrale » -, l'artiste note que l'homme et la bête, séparés par une grille, se fixent sans jamais se voir. Sur fond cosmique, elle en conçoit une perle de verre qu'elle superpose à un œil d'animal.
Mais il y a plus. En ce monde consumériste qu'obsède son reflet imaginale, elle ne voit plus dans le médium qu'une « interférence », une entière et inobservable « culture photographique » entravant désormais notre accès au réel.
C'est pour nous ressourcer que ses foules – métaphysiques – s'ouvrent en géantes chambres noires qui déjà « chamboule » le spectateur.
Sans cesse, il s'agira pour elle de « vider » le monde, d'y introduire un corps étranger ; gripper la mécanique de l'existant ; produire du moins un « bruit » dans ce silence social étale qu'elle aura elle-même instauré. Alors apparaîtra la marge ; ce reste qui nous chasse vers les bords dont personne de veut, que nul ne consommera.
Scellée en sa face la plus sombre, évidemment, une spectrale image, qui dépasse de très loin « la photographie », ne cédera en aucun cas au type d'échange que cette dernière engendre.
Texte de Michèle Cohen Hadria, Art Press, novembre 2002