
Le projet de Marina Gadonneix s'inscrit, selon ses propres termes, dans "l'observation du monde quotidien dans sa construction et sa mise en scène, faire du monde familier dans lequel on vit le lieu de l'artifice, avec sa part d'inquiétude, d'étrangeté et de mélancolie." Une des qualités de ce projet, outre sa réussite plastique, est également à trouver dans le degré d'explicitation qu'il se donne, et que l'on vient d'énoncer plus haut. Marina Gadonneix s'intéresse au monde des médias de cette façon biaisée, en photographiant les plateaux de télévision vides, hors des heures d'émission, est une idée brillante. Encore fallait-il la mener à bien. Ce qui est largement fait ici. À l'artificialité construite du studio, répond celle de l'image, qui en souligne les caractéristiques. Or ce monde superficiel du plateau de télévision est à l'image -si l'on peut dire- du monde intellectuel vide de la scène médiatique aliénante, souvent dénoncée par le sociologue Pierre Bourdieu. Derrière la séduction, le décor et sa surface, s'invite, hélas, le vide des contenus qu'ils encadrent. Ce travail est achevé, remarquable.
Lauréats 2006 de la Fondation HSBC pour la Photographie
LA SOLITUDE
Thème des plus dangereux en photographie traditionnelle, "la solitude" peut fournir de redoutables effets à qui ne sait pas utiliser les armes de l'humour ou de la distance critique… Clark & Pougnaud -un photographe et un peintre- ont mis leurs compétences en commun pour installer un théâtre de la solitude aux références picturales assumées et revendiquées. Familiers des montages numériques, grands connaisseurs de la peinture classique et moderniste, ces deux artistes rendent, à travers le thème de l'être seul, hommages aux artistes-peintres et autres artistes qui ont produit, sur ce sujet, des icônes célèbres. Edward Hopper, le "Magicien d'Oz", les contes de fées, le cinéaste Jacques Rémy, sont ainsi convoquées pour produire cette imagerie acidulée, pleine d'esprit et d'intelligence culturelle, à travers la forme contemporaine de la "photographie mise en scène". Un véritable tour de force technique vient inscrire les personnages dans des décors virtuels, fruits de la technologie numérique, et de la maîtrise photographique.
Gilles Mora, Conseiller artistique 2006 de la Fondation HSBC
Gilles Mora a commenté sa sélection devant le jury de la Fondation HSBC : "Près de 600 dossiers sont parvenus...Une grande majorité des envois relève d'un niveau d'amateurs de plus en plus séduisants, tant la diffusion de l'imagerie photographique, sans cesse accrue par le biais des publications ou des manifestations culturelles, induit par mimétisme une constante augmentation du savoir faire technique de l'amateur, facilité grâce aux technologies du tirage numérique et de l'informatique. Une quarantaine de dossiers, de provenances diverses -professionnels avérés, ou praticiens bien plus dilettantes- offrent un véritable degré de créativité et de crédibilité dignes des attentes du concours, à savoir la perspective d'une publication et d'une exposition majeure. Les douze dossiers sélectionnés représentent une vraie fraîcheur soit du sujet, soit de la stylistique, soit des deux en même temps, et n'écartent pas les recours aux technologies numériques, lorsqu'elles obéissent à une nécessité de contenu. En tout état de cause, l'objet de ce concours reste de donner à chacun, lorsqu'il en a le talent, une vraie chance d'accéder au tremplin offert par la Fondation”.
Chantal Nedjib, Déléguée générale de la Fondation HSBC pour la Photographie, remercie tous les photographes qui ont participé au concours 2006 de la Fondation et félicite les douze présélectionnés qui ont retenu l'attention de Gilles Mora. “J'ai plaisir à voir la diversité des travaux reçus après 10 ans d'existence de la Fondation, désormais appelée Fondation HSBC pour la Photographie. Le nombre et la qualité des dossiers reçus nous encouragent à poursuivre notre action. Nous sommes très heureux d'accompagner Marina Gadonneix, Virginie Pougnaud et Christophe Clark, dans la promotion de leur talent."