© John Divola, Zuma #64 , de la série Zuma , 1978, Courtesy John Divola et Laura Bartlett Gallery, London
Photo Levallois fête sa sixième édition en 2013.
Lancé en 2008 à l’initiative de la ville de Levallois, le festival inscrit dans la durée son engagement envers la photographie contemporaine sous toutes ses formes.
Depuis ses débuts, photo Levallois se veut ouvert aux évolutions de la photographie afin d’en restituer la pluralité et la richesse, en faisant la part belle aux jeunes générations et aux échanges avec les autres domaines de création. Des artistes reconnus internationalement ou émergents aux photographes amateurs, tous trouvent leur place dans un événement qui rassemble les grands courants de la photographie contemporaine, tout en affirmant un point de vue singulier sur la photographie contemporaine et son histoire.
Alors que la création et la diffusion de la photographie foisonnent et connaissent des évolutions profondes, le festival entend suivre les mutations du médium de façon pertinente et ouverte. pour cela, photo Levallois a adopté dès ses débuts une dimension internationale, privilégié des partis pris exigeants tout en veillant à rester accessible au plus grand nombre, dans un esprit de partage.
À l’instar du prix photographique ville de Levallois dont le rayonnement est aujourd’hui international, la programmation du festival est ouverte depuis ses débuts à des artistes du monde entier, pour des propositions dont beaucoup sont inédites.
John Divola - Invité d'honneur
John Divola est une figure incontournable de la photographie américaine depuis la fin des années 1970 et un acteur majeur de la scène artistique californienne.
Si son œuvre a influencé de nombreux artistes et constitue une contrée à part dans le monde de la photographie, ce n’est que depuis quelques années qu’elle touche enfin un plus large public. Photo Levallois revient sur plus de trois décennies de création, avec une exposition d’ampleur inédite en europe.
Après des études d’arts plastiques à UCLa, John Divola se retrouve au début des années 1970, l’appareil photo en main à arpenter sa région natale, la vallée de san Fernando. Il en fait un portrait amusé, déclinant l’architecture de la banlieue, la sociologie de ses habitants et leurs activités typiques en de belles photographies en noir et blanc qui témoignent d’une grande sûreté de moyens.
mais c’est en 1974, avec Vandalism, qu’il signe son premier ensemble majeur, et pose les bases de sa pratique entièrement novatrice. N’ayant pas les moyens de louer un espace pour travailler, Divola prend des photographies dans des bâtiments abandonnés, qu’il transforme en studio. Attiré par la confusion entre l’espace privé et l’espace public qui émane de ces lieux, il en fait le terrain d’expérience de ses recherches formelles sur la photographie en noir et blanc.
© John Divola, Zuma #63, 1978, Courtesy John Divola et Laura Bartlett Gallery, London
Muni de bombes de peinture grise, noire et blanche, il compose des motifs simples sur les murs, les plafonds ou encore les objets qu’il trouve sur place, qui tout en indiquant sa présence de façon détachée, permettent des jeux formels qui configurent un espace essentiellement photographique. il invente ainsi une pratique de studio a minima, décontractée et sauvage, teintée de transgression, dans laquelle la photographie dialogue avec la peinture, l’installation et la performance. par ailleurs, en phase avec l’un des enjeux essentiels de l’art à cette époque, John Divola introduit en contrepoint à la beauté formelle de ses images une dimension processuelle qui sera une constante dans toute la suitedesaproduction.Dans la foulée,ilentreprend un travail dans la zone pavillonnaire évacuée pour l’extension de l’aéroport de Los angeles. Réalisé sur des bases conceptuelles légèrement différentes de celles de Vandalism, ce corpus comprend une facette documentaire plus affirmée, avec notamment un recensement des effractions dans les maisons abandonnées, et un singulier ensemble de dyptiques intitulés House removals. Ces dyptiques juxtaposent deux vues quasi-identiques, celle de gauche précédant et celle de droite succédant la destruction d’une maison. Dénuées de tout pathos, ces photographies semblent vibrer encore de la violence du chantier. C’est l’une des caractéristiques des photographies de John Divola que d’incorporer une forme d’énergie puissante, située dans un hors champ ou l’imagination cavale en toute liberté.
En 1977, John Divola entame la célèbre série Zuma, donnant un aboutissement formel magistral à ses recherches. Il photographie de l’intérieur un poste de secours abandonné qui fait face à l’océan pacifique, squatté et voué à être rasé. ajoutant ses marques de peinture habituelles à celles des précédents visiteurs, amassant les décombres selon sa fantaisie, allant jusqu’à lancer un objet dans le cadre au moment de la prise de vue, il juxtapose le plus souvent l’intérieur d’une ruine aux atours psychédéliques et un coucher de soleil sur l’océan, créant un espace absolument inédit. Romantisme de la ruine, sublime du paysage, vandalisme trash, ces photographies extraordinaires fracassent joyeusement une cohorte de styles et brouillent la notion d’auteur, puisque Divola implique de nouveau les autres visiteurs anonymes en tirant parti de leurs interventions.
L’usage du flash fait rivaliser les couleurs des pièces dévastées et repeintes avec celles du ciel et de l’océan, si bien que l’intérieur et l’extérieur, l’artifice et le naturel se télescopent.
Si les années 1970 sont fondatrices pour l’œuvre de John Divola, les décennies suivantes le verront continuer sans relâche ses explorations du médium photographique, construisant une œuvre dont la profusion et la qualité sont exceptionnelles. ainsi, au
cours des années 1980, il suit une veine conceptuelle dans ses photographies, réalisant notamment des polyptyques, images aux couleurs irréelles, mises côte à côte selon une logique erratique. Ces rébus mystérieux ironisent sur la véracité du “document” photographique, comme l’ensemble Who can you trust (1983). Ce jeu qui prend la forme d’un aller retour constant entre la dimension d’enregistrement de la photographie et son caractère de terrain de création et d’affirmation est présent dans toute l’œuvre de Divola. il s’agit toujours conjointement d’archiver un fait, une performance, et de le transformer par la représentation photographique.
trois importants ensembles réalisés dans les années 1990 illustrent la dialectique de l’image et du processus typiquement à l’œuvre dans les photographies de John Divola. vivant aux abords de Los angeles, à proximité des zones désertiques qui s’étirent vers l’est, il est attiré par ces étendues vides et silencieuses, dans lesquelles le moindre détail prend de la consistance. ainsi, il effectue une sorte de recensement de maisons, les Isolated houses, qu’il photographie comme des sculptures aux formes géométriques rudimentaires, échouées dans l’immensité du plateau. en plus de l’enjeu formel, il explore une nouvelle fois les marges de la société, décrivant à propos de ces maisons et de leurs habitants une sorte de “degré social zéro”.
Au cours de ses longues promenades en voiture dans le désert, il lui arrive souvent de trouver un chien aux abords d’une maison, qui prend en chasse sa voiture. De ces courses-poursuites hilarantes, John Divola a formé une série de photographies sobrement intitulées Dogs chasing my car in the desert, instantanés en noir et blanc pris à la volée, à travers la fenêtre de sa voiture. Ces images irrésistibles incarnent toute l’énergie de l’action qui leur a servi de prétexte. elle sont également, pour Divola, une métaphore de l’acte photographique, en ce sens qu’il est aussi illusoire pour un chien d’essayer d’attraper une voiture, que pour un photographe d’attraper le réel avec un appareil photo.
Toujours dans le registre métaphorique, avec la même distance élégante et la même décontraction, As far as I could get constitue un point d’orgue de l’œuvre de John Divola. s’élançant devant son appareil photo posé sur un trépied, sa course semble stoppée par l’instant fatidique auquel l’obturateur s’ouvre et la photographie advient. Divola occupe cette fois ci résolument l’espace photographique avec son corps, dans une mise en scène qui évoque le mythe de sisyphe. il devient le héros fauché en pleine action, par l’acte photographique lui même. Mais cette chasse est bien sûr orchestrée par le photographe, qui a tout de même défini la durée du retardateur, et donc de sa course. en définitive, tout cela est un jeu et c’est l’artiste qui en fixe les règles.
Le Prix
Le jury du prix photographique ville de Levallois 2013, réuni le 7 juin, a décidé de décerner son prix à Max Pinckers pour son travail The Fourth Wall. il a été désigné parmi 229 dossiers en provenance de 38 pays.
Le prix consiste en une bourse de 10 000 euros assortie de la production d’une exposition dans le cadre de la sixième édition du festival photo Levallois, qui se tient cette année du 4 octobre au 16 novembre 2013.
Le jury a par ailleurs décidé d’accorder des mentions spéciales à Jonna Kina et Marleen F. Sleeuwits qui se verront également offrir la production d’une exposition.
Fidèle à la vocation internationale du prix, le jury 2013 a réuni :
- Charlotte Cotton, commissaire d’expositions et auteur, basée à Londres. précédemment curatrice au victoria and albert museum et au Los angeles County museum of art. elle est fondatrice du blog Words Without Pictures.
- Chris Wiley, artiste et commissaire d’expositions basé à New york, collabore aux magazines Frieze et art Forum. - Sandra Mulliez, collectionneuse et fondatrice de sam art projects, paris
- Bruno Ceschel, fondateur et directeur de l’organisation self publish, Be happy
- Stéphane Decreps, adjoint au maire délégué à la Culture, ville de Levallois
Max Pinckers, Lauréat du Prix photographique ville de Levallois 2013
Lauréat du prix photographique ville de Levallois 2013, Max Pinckers prend la forme documentaire comme point de départ, pour construire des ensembles qui en exploitent les paradoxes et les limites. Une rigueur remarquable ressort de l’ensemble des choix qu’il effectue depuis le choix du sujet traité, le protocole de prises de vue, jusqu’à la mise en forme des images. La densité de sa réflexion trouve son pendant dans la qualité de ses photographies.
Après un premier travail mené en duo avec un de ses camarades de l’académie royale des Beaux-arts de Ghent sur les travestis thaïlandais (le fantasme, sous toutes ses acceptions, semble constituer la matière première l’œuvre de max pinckers), il entame The Fourth Wall en 2012, lors d’un séjour de plusieurs mois à Bombay.
Sorte de portrait à rebours de la ville à travers l’imaginaire de ses habitants, l’ensemble dont la forme initiale est un livre auto-édité, est constitué d’images mises en scène avec soin, de photographies trouvées et de textes divers (citations, articles de presse locale, extrait de récit, script de film), dont la diversité entretien la confusion sur la nature des images et de leur source.
Toutes les photographies sont réalisées avec des personnes ordinaires rencontrées dans l’espace public, auxquelles max propose de rejouer une scène de leur choix, issue la plupart du temps d’un film ou d’une série télévisée. Ces inconnus se prêtent au jeu avec une délectation communicative, tandis que pinckers photographie leur performance avec des moyens techniques élaborés. L’éclairage est soigné, le cadrage précis, et le photographe laisse délibérément apparaître dans l’image les éléments qui attestent sa mise en scène et donc son caractère purement fictif.
© Max Pinckers
D’autres photos sont des reconstitutions basées sur les textes cités ci-dessus, ou des images trouvées faisant écho au propos de Pinckers.
Loin de l’image angélique véhiculée en occident, d’une inde en plein boom économique, se conformant docilement à l’exotisme exubérant et bon teint de certaines productions de Bollywood, pinckers esquisse, en filigrane de ses photographies réjouissantes, parfois presque ingénues, une réalité sociale d’une noirceur radicale.
Cette noirceur est présente dans les sources de certaines des photographies, puisque les scènes rejouées sont parfois des tragédies, jonchées de meurtres, de désillusions et de suicides, sur fond de grande pauvreté. mais l’aspect formel très pictural et le caractère ostensiblement théâtral des photographies, l’enthousiasme des acteurs d’un jour, leur confère une clarté, une légèreté, qui leur donne une ambivalence passionnante.
Également à l’état de latence, l’autre forme de violence qui parcourt ce travail émane de la production industrielle d’un imaginaire (par la télévision, le cinéma et aussi la presse) qui s’impose aux individus et leur fournit des repères erronés. si elle offre des exemples cocasses, la confusion rapportée par max pinckers entre le monde réel et le spectacle pousse parfois les individus à des actes tragiques. C’est cette indétermination entre le réel et l’imaginaire mise en évidence selon des moyens inventifs et multiples qui est au cœur de The Fourth Wall.
Oscillant entre réalité et fiction, farce et tragédie, max pinckers joue au prestidigitateur. Les écrans, rideaux et masses de fumée colorée qui rythment ce travail sont comme autant de faux-semblants et de voiles occultant le monde réel et ses représentations.
max pinckers est né en 1988. Diplômé de l’académie Royale des Beaux-arts de Ghent, il est membre du collectif foundfootgae.be, plateforme qui promeut des archives d’images et de textes vernaculaires.
Marleen Sleeuwits, Mention spéciale du Jury
Oscillant entre abstraction et géométrique et vues d’installation in-situ, les photographies de marleen sleeuwits créent une réalité plutôt qu’elles ne la documentent.
Ses premières images d’intérieurs d’aéroports prises en 2004 portaient déjà en elles ce glissement spécifiquement photographique d’un lieu tangible à une image mentale. La froideur lisse des surfaces à l’aspect industriel, l’éclairage au néon qui abolit la temporalité du rythme naturel ; ça et là, un détail incongru, une contradiction entre des matières, des couleurs, une aberration spatiale suscitée par la répétition d’images quasi identiques. La première impression devant ces photographies était déjà un sentiment d’étrangeté, une incrédulité au vu de la banalité uniforme des espaces de transit d’un monde dominé par le rationalisme, que marleen sleeuwits transformait en compositions quasi- abstraites par un cadrage habile et une attention sensible à la couleur.
En 2007, elle commence à travailler de façon systématique dans ce type d’environnements standardisés et fonctionnels, qu’il s’agisse d’immeubles de bureaux, d’hôtels ou de salles d’attente. elle développe cet ensemble nommé Interiors pendant les 6 années suivantes. au fil du temps, le caractère descriptif de ses photographies s’estompe, jusqu’à devenir totalement absent.
L’enjeu de ce travail s’affirme comme artistique et conceptuel plus que politique. il s’agit pour marleen sleeuwits d’utiliser un sujet d’apparence banale pour mieux exposer certaines caractéristiques du médium photographique. en premier lieu, sa capacité à fournir d’un sujet une représentation qualifiée de “réaliste”, tout en le transformant de façon subtile mais néanmoins radicale. enfin, la possibilité de créer un espace spécifiquement photographique, c’est à dire qui ne peut être perçu que par le biais de la représentation photographique.
© Marleen Sleeuwits, Interior no 40, 2013
A cet égard, le tournant pris par Marleen en 2011 est éloquent. pour libérer plus encore ses photographies de l’aspect documentaire, elle installe son studio dans un immeuble de bureaux désaffecté, dans lequel elle modifie les salles avant de les photographier. Utilisant des matériaux trouvés sur place, elle re- configure entièrement l’espace afin de pouvoir en obtenir une image photographique abstraite, qui n’a plus rien à voir avec l’aspect originel du lieu. pour ce faire, elle se base sur une intuition suscitée
Par l’espace tel qu’elle le perçoit de prime abord. Cette intuition guidera la transformation qu’elle effectue, afin d’amplifier la perception choisie, de sorte que celle-ci prenne le pas visuellement sur les caractéristiques réelles de l’espace.
Opérant une mise en scène à l’échelle de l’architecture, son travail consiste en une sorte de super-photographie de studio. Le studio n’est plus seulement le lieu qui héberge l’intervention du photographe. il devient ici la matière même de cette intervention. Dans ses dernières photographies, l’intervention de marleen s’apparente également à la sculpture. La pièce est restructurée pour servir d’écrin à une grappe de néons ou une énorme masse de papier peint. marleen a d’ailleurs récemment fait ses premières œuvres non photographiques. il s’agit de sculptures.
Depuis quelques années, les pratiques les plus novatrices en photographie semblent se situer à bonne distance du réel et de son hypothétique documentation, dans l’extension et la redéfinition des modes d’actions de l’artiste-photographe. Dans ce contexte de renouveau stimulant, la contribution de marleen sleeuwits est des plus pertinentes. D’un point de vue historique, elle évoque notamment les recherches de Barbara kasten.
Marleen Sleeuwits (née en 1980), a fait ses études à l’académie Royale des Beaux-arts de la hague, puis à l’académie des Beaux-arts de Breda. Depuis 2003, ses photographies ont été exposées aux Usa, en angleterre, en italie, en Corée du sud, en allemagne et en hollande.
Joanna Kina, mention spéciale du Jury
Jonna kina aborde la photographie avec une ouverture d’esprit qui lui permet d’explorer des relations inattendues entre le sujet et sa représentation.
Animée par une curiosité pour d’autres formes de création, elle développe parallèlement un travail de vidéo, dont l’une des caractéristiques est l’attention accordée au son et à la mise en espace sous forme d’installation. Deux rencontres ont été décisives à cet égard. tout d’abord celle de l’artiste californienne sharon Lockhart, auprès de qui elle a travaillé en tant qu’assistante. Également eija Liisa ahtila, dont Jonna a été l’élève à la alvar aalto school of Design d’helsinki.
C’est au cours de la création de son installation vidéo Reconstructions que Jonna kina a découvert l’existence des foley objects. Ces objets étranges sont utilisés pour le doublage des effets sonores dans les films. À mi-chemin entre la sculpture et l’instrument de musique concrète, chacun d’entre eux est l’œuvre d’un foley artist, créateur à la pratique empreinte de jubilation infantile, qui reste généralement dans l’ombre, puisque seuls une poignée d’initiés notera leur présence dans un générique de fin.
Fascinée par ces pièces délicates, Jonna kina les a photographiées de façon simple et directe, sur un fond blanc uniforme qui aiguise leurs formes fragiles et leurs couleurs passées. insistant sur l’ambiguité de leur statut, entre bricolage incongru et sculptures poétiques, elle rend hommage à ces créations et à leurs auteurs.
Ce travail est également l’occasion d’expérimenter une relation double entre les images et les mots. Chaque foley object est accompagné d’une mention placée en dessous dans la marge blanche du tirage photographique. Ces mots remplissent tour à tour la fonction de titre de l’image, et celle de descriptif du son reproduit par l’objet.
Ainsi, l’interprétation de la photographie se situe à deux niveaux, ce qui rend cet ensemble passionnant. on pourra par exemple reconnaitre dans un rouleau de papier aluminium dont dépasse un morceau qui s’élance vers le haut, l’analogie formelle avec le feu. ou alors, l’oreille prenant le pas sur l’œil dans l’espace mystérieux de l’imagination, on entendra la même feuille d’aluminium crisser et claquer, saluant avec délice son interprétation de la musique archaïque du feu.
Jonna kinna est née en 1985. Diplômée de l’université alvar aalto et de l’académie des Beaux-arts de Finlande, à helsinki, elle est l’une des fondatrices du collectif maanantai, qui réalise des œuvres multimédia de façon collégiale.
Erwan Frotin - Artiste invité
Artiste singulier évoluant à contre-courant des modes hexagonales - ses images au formalisme de haute volée évoquent le meilleur de la photographie américaine - erwan Frotin s’est fait un nom dans la photographie de publicité et de mode depuis le début des années 2000.
Avec ses natures mortes minutieusement composées en studio, saisies à la chambre puis généralement rehaussées avec photoshop, comme on dit d’un dessin qu’il est rehaussé à la gouache ou au pastel, il explore les paradoxes de l’artifice dans des images poétiques, d’une beauté saisissante. sa fascination pour les formes, les phénomènes et les sciences naturelles, s’apparente à celle d’un érudit qui composerait un cabinet de curiosité avec fantaisie et vénération.
L’ensemble Flux, travail au long cours initié en 2009, constitue un tournant dans sa pratique qui privilégiait jusqu’alors le monde clos du studio. il est constitué de photographies prises dans des lieux sauvages au cœur de contrées qu’on imagine fort lointaines, qui semblent dépeindre un monde dans sa pureté paradisiaque, exempt du passage de l’humanité. y font écho des images réalisées en studio, très sculpturales, dans la lignée de travaux antérieurs comme Sketch (2006), ou Flora Olbiensis (2007).
© Erwan Frotin, Sans titre, 2009 - 2013
On peut regarder Flux comme une célébration de la splendeur de la nature en tant que cours immuable des phénomènes, dans lequel chaque élément tour à tour se distingue dans un éclat de beauté singulière, et se fond dans le tout, selon une dynamique merveilleuse, toujours aussi jeune et toujours aussi vieille. La perfection des sujets et de leur représentation distille souvent le doute, quant à la part d’intervention entreprise par le photographe (mise en scène, retouche). peu importe, en définitive. Une photographie ne transforme-t-elle pas inévitablement son sujet ?
Ce répertoire de formes animales, végétales, minérales, mais aussi de ciels embrasés et de cascades virginales empreinte la forme du processus qu’il tente d’approcher : un flux.
L’ambition encyclopédique qu’on retrouve de loin en loin dans les travaux d’erwan Frotin rappelle dans une certain mesure celle de karl Blossfeldt (1865-1932), qui constitua un répertoire de formes végétales à des fins de documentation, intitulé Le jardin merveilleux de la nature. erwan Frotin cite volontiers le grand paysagiste américain eliot porter (1901-1990), pionnier de la photographie en couleur, prônant la protection de l’environnement avant que l’écologie ne soit un concept répandu, auteur de vues inoubliables, notamment d’oiseaux en plein envol. parmi les contemporains, la virtuosité, le grand aboutissement formel des photographies d’erwan Frotin, la diversité des genres dans lesquels il opère sur la base d’une solide connaissance historique du médium et sa capacité à les réunir de façon fluide, trouvent un écho dans l’œuvre de Roe ethridge. Comme celui- ci, erwan Frotin remet en question la très usée et néanmoins tenace distinction entre pratique artistique autonome et photographie de commande.
Erwan Frotin est né en 1978. Diplômé de l’eCaL en 2002, il remporte la même année le prix de photographie du Festival d’hyères. après un passage remarqué en 2011 à la Fondation Ricard à paris, il présente, en extérieur, un ensemble inédit et envoûtant dans le cadre de photo Levallois 2013.
Artie Vierkant - Artiste invité
Artie Vierkant est l’un des plus brillants représentants de la jeune scène artistique américaine qui donne un nouveau souffle à la photographie en l’abordant sous l’angle de sa matérialité.
Les pièces hybrides de la série Image-Objects, évoquent plus la sculpture que la photographie, bien qu’elles soient fabriquées à partir de matériaux typiques de la photographie contemporaine (tirage et contre-collage sur aluminium). plus étonnant, l’artiste a décidé d’intégrer à cet ensemble la documentation des œuvres, en retouchant systématiquement les vues d’exposition, de sorte que les pièces ne peuvent s’appréhender de même façon in situ et une fois reproduites.
© Artie Vierkant Image Object Monday 11 March 2013 1:15 PM, 2013 photo: aurélien mole © Artie Vierkant, courtesy New Gallery