Centre de photographie de Lectoure 5, rue Sainte-Claire 32700 Lectoure France
La confrontation entre nature et culture est pour Rémy Marlot un sujet de prédilection. L’impression de fiction qui se dégage de ses photographies et de ses vidéos est d’autant plus troublante qu’on ne sait pas réellement d’où elle vient. Comme le remarque Quentin Bajac, “ce parasitage du réel par la fiction, cette porosité des deux univers est au cœur du travail de Rémy Marlot”. Dans la série The Valley, une sensation d’étrangeté naît du fait que l’unité de lieu annoncée par le titre est purement imaginaire, la série réunissant des vues de la Forêt Noire, du Morvan, de Paris, du Jura... Avec son esthétique du délabrement et de l’envahissement de la cité par la nature, The Valley développe le mythe d’une cité perdue. La série offre l’image crépusculaire d’un monde suspendu dans le temps comme si la vie avait quitté les lieux. Quant à la tonalité noire bleutée des Black Churches qui donne à la cathédrale de Cologne un aspect absolument irréel, elle est simplement due à l’exploitation magistrale de prises de vue à contre-jour. “J’essaie de traduire le sentiment de beauté et de solitude que j’éprouve à cet instant, résume Rémy Marlot lorsqu’il est interrogé sur ses motivations. Nul dessein véritablement documentaire n’anime son propos, mais bien plutôt une volonté de rendre compte, de manière expressive, par-delà l’enveloppe extérieure des sujets photographiés, d’un genius loci, celui du sentiment magique secrété par un lieu. Peu importe sa nature exacte. [...] Si l’attention de Marlot est essentiellement retenue par des ‘formes et signes architecturaux qui [lui] semblent étranges et mystérieux’, tous ces lieux sont presque hors de l’usage et du temps. C’est le suspens d’usage des lieux modernes (bâtiments désaffectés, friches en attente, lieux vides de présence humaine) comme l’inadéquation des lieux anciens au monde contemporain qui confèrent, aux yeux de Marlot, cette étrangeté et ce mystère. Par-delà leur apparente diversité, le dénominateur commun de nombre des lieux qu’il photographie, qu’il s’agisse de ceux à l’abandon de la périphérie parisienne ou d’une cathédrale gothique, est bien ce passage inexorable et ravageur du temps.” Quentin Bajac