Nicole Kidman © Peter Lindbergh
Parce que bon, pour info, le mec a juste pris des photos de femmes célèbres de plus de quarante ans sans maquillage pour le calendrier Pirelli 2017. Alors on va se détendre tout de suite, se reprendre une capsule de passiflore et se rappeler de deux-trois choses.
D'une, à toutes celles et ceux qui ont un avis sur Pirelli, qui s'extasient sur les photographies sublimes de Lindbergh et se paluchent sur cet objet devenu légendaire. Sachez déjà que vous n'en aurez jamais un exemplaire chez vous, à moins de faire partie des happy few blindés et influents de notre joli monde. Souvenez-vous aussi, si ça peut consoler votre petit cœur meurtri par tant de haine et de discrimination sociale, qu'il s'agit à l'origine d'une marque de pneus. Pas si loin donc de la cabine de routier. D'où l'esprit gros seins et fesses rebondies qui hantent ses éditions depuis le début des années 1960. Faudrait pas se cacher derrière le petit doigt ou le gros objectif de Peter.
Uma Thurman © Peter Lindbergh
Parce que de deux, c'est là toute la stratégie de communication de Pirelli depuis ses débuts, qui a su souffler le chaud et le froid... puis le chaud, puis le froid, puis le très très chaud, et caetera et caetera. Si en 1963, on commence soft, en fumant des clopes ou en faisant du cheval en maillot de bain, très vite à partir de 1968, on se dénude - fesses, pubis poilu et seins à l'air - et on mange des bâtons glacés en très gros plan sous l'objectif de Harri Peccinotti. On se calme de nouveau en 1972 avec l'élégante Sarah Moon. Pour repartir de plus belle ensuite : jambes écartées, tétons de latex, boobs, fesses, boobs, fesses... avec ou sans fausses traces de pneu d'ailleurs (!) comme dans l'hilarante série de Uwe Ommer en 1987. Alternent donc le pire et le meilleur, les gladiatrices géniales et tout en seins de Elgort succèdent à la série néocoloniale de Terence Donovan avec ses jeunes métisses (esclaves ?) aux seins nus. Herb Ritts, Richard Avedon passent par là. En 2000, on reste subjugué par les corps en vie, en veines et en poils de Annie Leibowitz. Dix ans plus tard, Terry Richardson les remplace par des filles nues aux activités pour le moins insolites : à quatre pattes, à câliner un paresseux, à lécher la crête d'un coq ou à manger des petites bananes.
De trois, au-delà des photos de ce calendrier 2017, c'est surtout le discours qui énerve profondément. Quand Lindbergh dit : « En tant qu’artiste, je ressens la responsabilité de libérer les femmes de la jeunesse éternelle et de la perfection. L’idéal de beauté parfaite mis en avant par la société est un objectif irréalisable ». On a vraiment envie de lui mettre la tête dans un pot de Diadermine à l'extrait de protéine de perle pour qu'il se taise. L'artiste à responsabilité qui nous libère les femmes à coups de photo de Nicole Kidman sans rouge à lèvres. Sans déconner ? Mais la prochaine fois, Peter, va encore plus loin, ose le "sans brushing" ? Le "pas épilé" ? La trace de pneu, la vraie ?
Allez, pour conclure plus élégamment, on a un petit conseil de lecture pour Peter et tous les autres libérateurs des femmes : https://pouletrotique.com/2016/11/29/pubs-sexistes-palmares-2016-de-lelegance/".