Musée du quai Branly 27, 37, 51 quai Branly 206, 218 rue de l'Université 75007 Paris France
Autant l'admettre : on allait pas à ce vernissage de Photoquai 2011, 3ème biennale des images du monde, avec les meilleurs à priori. Ce qui tenait au temps mitigé de ce lundi 12 septembre sur le quai Branly et surtout, à une méconnaissance de l'évènement.
Créé en 2007 par le musée du quai Branly, la biennale Photoquai se consacre à la photographie non occidentale ; le but est de faire connaitre des photographes (46 cette année) quasiment inconnus en Europe, issus des zones couvertes par le musée - Afrique, Asie, Océanie, Amériques, ce au moyen d'une recherche partagée entre plusieurs commissaires et correspondants (Olivier Culmann en Inde, Christian Caujolle pour le Brésil, le Cambodge et Cuba, Sylvie Rebbot sur la Chine…).
Devant la multitude d'images annoncées - 400 - nos craintes se portaient sur la pertinence et la cohérence du tout. Autant dire qu'elles ont été vite dissipées : la direction artistique, confiée à la photographe Françoise Huguier, fait la part belle à une multitude de projets forts et aboutis. Si Françoise Huguier évoque une récurrence de travaux «de l'ordre du récit, de l'intime», on ne peut s'empêcher de penser que le principal point commun entre les travaux présentés est au moins autant le haut degré d'exigence artistique à l'oeuvre.
On aura ainsi été impressionné, entre autres, par le travail de Julian Lineros sur l'AUC, un groupe paramilitaire recrutant parmi les enfants pauvres de Colombie pour les entraîner en pleine jungle à la guérilla contre les FARC et aux trafics divers de la région. Ses images muettes d'enfants couverts de boue, comme statufiés en pleine jungle, évoque à la fois une tradition photographique de dénonciation du rôle des enfants dans les conflits que l'univers visuel de films comme Apocalypse Now.
© Julian Lineros
La série Fake Animals du biélorusse Andrei Liankevitch captive aussi par son univers onirique à cheval entre le mystère et l'absurde : le photographe a disposé des animaux empaillés en pleine nature pour les faire sembler vivants.
Cette qualité plastique se retrouve dans les images de l'Indonésie Jim Allen Abel, qui démystifie les uniformes du pouvoirs en les affublant de finitions loufoques : cotillons, fleurs, plumes, donnent de l'énergie à ses portraits très épurés. L'irakien Jamal Penjweny, avec sa série Saddam is Here, livre une image simple mais dense ; un chirurgien au visage caché derrière celui de Saddam Hussein, imprimé sur une feuille.
© Jamal Penjweny
Georgy Pervov fait quelque peu figure d'exception au coeur du quai Branly ; entouré de photographes qui manient la mise en scène, le récit intime et mesuré, il donne à voir des scènes de "Total Realism" comme il le dit lui-même ; anecdotiques en apparence et inattendues, elles sont pourtant intenses et évoquent Martin Parr comme Lars Tunbjork, appellant à être regardées avec attention pour en savoir plus sur la déroutante société russe...
Autant dire qu'on ne saurait trop vous conseiller d'aller vous promener devant le musée du Quai Branly et dans ses jardins, où la variété esthétique et thématique des sujets fait de ce Photoquai 2011 un événement à la fois ouvert et pointu. Plus d'informations ci-dessous.
© Georgy Pervov
Antoine Soubrier, le 12 septembre 2011.
Créée en 2007 par le musée du quai Branly et consacrée à la photographie non occidentale, PHOTOQUAI, la biennale des images du monde se déroule du 13/09/11 au 04/12/2011 sur les quais longeant le musée du quai Branly et dans le jardin du musée, en partenariat avec des institutions culturelles parisiennes. La direction artistique de la troisième biennale PHOTOQUAI est confiée à Françoise Huguier, photographe et réalisatrice, qui, avec 15 commissaires, a sélectionné 46 photographes du monde entier. Pendant près de trois mois, l’ensemble de la sélection est présenté, en accès libre, de jour comme de nuit.
Dans la continuité de la première biennale, créée en 2007, PHOTOQUAI 2011, dédiée à la photographie non occidentale, poursuit sa mission d’origine en faisant découvrir des artistes dont l’œuvre est inédite en Europe. Mission fédératrice aussi puisqu’il s’agit de multiplier les croisements de regards en un système d’échange d’un lieu à l’autre. Après l’immense succès que les deux premières biennales ont connu en 2007 et 2009, aussi bien auprès du public que de la presse, nous avons étendu la durée de cette manifestation à presque trois mois, du 13 septembre au 4 décembre. Projections, conférences, colloque sur la photographie africaine scandent cet événement d’envergure internationale.
La direction artistique revient cette année à Françoise Huguier, photographe et réalisatrice, femme de terrain qui a donné une vision sans complaisance des appartements communautaires de Saint-Pétersbourg comme des femmes africaines dont elle a peint l’intimité à travers son objectif, avec une infinie justesse. Pour cette nouvelle édition, elle a sélectionné en lien avec quinze commissaires dont Olivier Culmann pour l’Inde, Christine Eyéné pour l’Afrique, Christian Caujolle pour Cuba ou encore Mouna Mekouar pour le Maghreb, une quarantaine de photographes émergents de près de trente pays différents qui, par l’instantané et la magie de l’image, ont fixé un nouveau mode de rapport au monde.
Les œuvres sont une fois encore exposées sur les berges de la Seine suivant un parcours spécialement conçu par Patrick Jouin. Ce scénographe, partenaire de la première heure, conscient que, comme le disait Willy Ronis : « les photos sont pleines d’histoires », sait marier la couleur et le noir et blanc et faire alterner avec bonheur les formats ou les séries dans un souci permanent de mise en valeur de chaque mode d’expression individuel.
Cinq photographes sont également présentés dans l’enceinte du jardin du musée, comme pour assurer le passage de l’espace urbain à un univers végétal touffu, labyrinthique et quasi initiatique. Chaque artiste se révèle par l’identité de son point de vue mais également par ses contextes de production et d’influences. Filiation directe ou clin d’œil parodique, ce jeu de miroir, qui renvoie à des réalités et des repères différents des nôtres, tisse une véritable aventure du regard. Je remercie les partenaires associés cette année à ce projet, notamment la galerie Baudoin Lebon, la galerie In Camera, la galerie Paris Beijing, la Maison de l’Amérique latine, la Maison européenne de la photographie, le Petit Palais, la Polka Galerie, la tour Eiffel qui contribuent, à travers cette promenade esthétique dans Paris, à ouvrir des perspectives éclectiques sur la création contemporaine.
Stéphane Martin, Président du musée du quai Branly.